200 ans après l'interdiction de la traite des Noirs, 146 ans après la signature de la proclamation d'émancipation des esclaves, 45 ans après le "rêve" de Martin Luther King, les États-Unis prouvent que quoiqu'on en dise, ils sont ce pays "où les gens ne sont pas jugés d'après la couleur de leur peau, mais d'après la qualité de leur personnalité".
Barack Obama, 46 ans, sénateur de l'Illinois, né d'un père africain et d'une mère américaine, sera, le 4 novembre, le candidat du Parti démocrate à la Maison-Blanche; le premier champion afro-américain d'un des deux grands partis des États-Unis.
Difficile de ne pas être saisi par la symbolique puissante du moment.
Quand il avait annoncé, en janvier 2007, sa candidature à la présidence, personne ne donnait la moindre chance à ce maigrichon au nom bizarre, sans expérience et après à peine trois ans au Sénat. Mais son appel au "changement" et ses talents d'orateur charismatique ont déclenché un mouvement de fond chez les jeunes et les militants démocrates, à quoi s'est ajouté une mobilisation massive des Noirs américains.
En captant le profond rejet de la politique de Bush, il a su organiser et alimenter une fantastique machine à recueillir des soutiens et fonds.
Hillary Clinton a apporté samedi son "plein soutien" à son ex-rival Barack Obama et jeté l'éponge.
Mais, pour espérer revenir à la Maison Blanche après huit ans de présidence républicaine, les démocrates doivent d'abord parvenir à recoller les morceaux après une campagne à couteaux tirés qui les laisse profondément divisés.
Le fait est que jamais dans l'histoire américaine une élection primaire n'a été aussi serrée.
Obama ne s'est imposé que d'un cheveu, au nombre de délégués, au nombre de voix ou au nombre d'États, alors que 35 millions d'américains ont voté.
Les salariés modestes, les femmes et les Hispaniques constituent le cœur du vivier d'Hillary Clinton et les conseillers d'Obama reconnaissent volontiers qu'il a peu de chances d'être élu s'il ne parvient pas à ramener vers lui les 18 millions d'électeurs de la sénatrice de New York.
Or une partie d'entre eux risquent de bouder les urnes en novembre, voire de voter McCain : Obama a désormais en fait plus besoin d'Hillary que cette dernière n'a besoin de lui.
L'équilibre entre les 2 rivaux reste à inventer.
L'entourage d'Obama est absolument contre une présence trop marquée de Clinton dans la campagne, certainement motivé par l'envie de ne pas avoir à partager les places avec les partisans d'Hillary dans la future administration).
Par ailleurs, s'il entre à la Maison-Blanche, le jeune sénateur peut redouter de voir l'ex-Première dame agir en franc-tireur, et d'avoir en plus dans les pattes son mari qui ne peut s'empêcher de vouloir jouer les premiers rôles.
Obama risque également d'avoir plus de mal à porter son message du "
changement" s'il fait équipe avec quelqu'un qu'il n'a cessé d'attaquer comme l'incarnation de la "
politique de Washington" qu'il renie.
Mais nécessité fera loi. Obama sait que partir à la bataille en novembre sans l'appui de la femme qui a le soutien d'une moitié de l'électorat démocrate, et un puissant réseau de soutiens financiers et politiques serait suicidaire. Clinton est une arme contre les attaques de McCain sur son supposé "libéralisme" et sur les mises en doute de son "patriotisme".
La solution la plus probable serait le poste de vice-présidente, faisant d'elle, la première femme à exercer cette fonction.
Mais dans un sens ou dans l'autre, de la réconciliation des deux rivaux, qu'ils fassent équipe ou pas, dépend en partie le résultat de la présidentielle 2008.