C'est une première et pas n'importe laquelle.
Pour la première fois depuis son entrée en fonction en 2001, la Cour pénale internationale (CPI) vient de lancer un mandat d'arrêt contre un chef d'Etat en exercice.
Le grand gagnant est le président soudanais Omar al-Bachir. Il est poursuivi pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité au Darfour.
Le Darfour, c'est plus de 300.000 morts selon l'ONU... et 10.000 selon Khartoum, depuis 2003.
Le conflit a déplacé 2,7 millions de personnes et 100.000 "ont péri de mort lente" dans des camps, de faim et de maladie.
Une catastrophe à tous les niveaux et, hormis quelques imbéciles patentés, comme la ligue arabe, ou l'Union Africaine, reconnue de tous.
La vraie question va se jouer maintenant.
Comme la CPI n'a pas de police à sa disposition et n'a pas de mandat d'arrestation, il va effectivement falloir être très attentif à la manière dont les Etats vont réagir à partir d'aujourd'hui et traitent al-Bachir : va-t-il devenir un paria international, un peu comme Charles Taylor, Ratko Mladic et Radovan Karadzic ? Dans ce cas, l'étau se refermera progressivement sur lui, il sera affaibli et délégitimé.
Ou alors, va-t-il pouvoir maintenir des liens étroits avec des Etats, de la Ligne arabe, de l'Union africaine, la Chine et d'autres ?
Ça va être véritablement un test de crédibilité de la CPI : pour réussir, elle a besoin du soutien à la fois politique et militaire des Etats. Or, militairement, on voit mal aujourd'hui une arrestation, mais est-ce que politiquement il va y avoir une sorte de mise en quarantaine ou de cordon sanitaire autour du président soudanais ?
Si tel est le cas, alors la CPI aura d'une certaine manière triomphé. Si ce n'est pas le cas, elle aura produit un acte très fort, mais qui n'aura pas rencontré l'effet escompté et elle en sortira plutôt affaiblie.
Donc le moment de vérité commence maintenant.